Domanialité publique et associations de propriétaires : un sacerdoce !

Domanialité publique et associations de propriétaires : un sacerdoce !

Un arrêt du Conseil d’état du 23 janvier 2020 est venu notamment préciser que « le régime des associations foncières urbaines libres est incompatible avec celui de la domanialité publique, notamment avec le principe d’inaliénabilité. Par suite, des locaux acquis par une personne publique dans un immeuble inclus dans le périmètre d’une association foncière urbaine libre, fût-ce pour les besoins d’un service public, ne peuvent constituer des dépendances de son domaine public. »

Ainsi, en acceptant de se soumettre au régime de l’AFUL, la commune a soustrait l’immeuble aux règles de la domanialité publique, de telle sorte que l’immeuble dépend de son domaine privé et peut faire l’objet d’une cession. 

Cette position du Conseil d’Etat est liée à l’hypothèque légale, instituée par l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004, « arme » dont dispose l’AFUL sur les biens de ses membres compris dans son périmètre pour garantir sa créance. Sa mise en œuvre pourrait conduire à l’aliénation du bien ; or le domaine public est insaisissable et inaliénable.

Le Conseil d’Etat a adopté la même position s’agissant d’une ASL dans un arrêt du 10 mars 2020, ce qui nous amène à considérer qu’il en est ainsi pour toutes les associations de propriétaires régies par l’ordonnance du 1er juillet 2004.

Mais ce dernier arrêt est venu ajouter une précision complémentaire, à savoir que l’entrée en vigueur de l’ordonnance précitée ne saurait avoir eu pour effet d’emporter le déclassement des biens qui, avant cette entrée en vigueur, appartenaient déjà au domaine public et se trouvaient compris dans le périmètre d’une association de propriétaires.

Ces biens continuent ainsi de dépendre du domaine public de la personne publique, sauf à être déclassés. La seule conséquence de l’incompatibilité entre le régime de la domanialité publique et le régime des associations de propriétaires réside dans l’impossibilité pour l’association de mettre en œuvre sa garantie légale contre la personne publique propriétaire desdits biens inclus dans son périmètre.

En conclusion, de ces deux arrêts, nous retenons :

  • qu’un bien inclus dans le périmètre d’une association de propriétaire qui, avant le 1er juillet 2004, dépendait du domaine privé de la collectivité, et qui aurait reçu après cette date une affectation publique, n’a pas pu entrer dans son domaine public,
  • mais qu’un bien qui, avant le 1er juillet 2004, dépendait du domaine public de la personne publique, continue à en faire partie, bien qu’inclus dans le périmètre d’une association de propriétaires, l’ordonnance du 1er juillet 2004 n’ayant pas eu pour effet de les avoir déclassés.

Ces solutions nous apportent des précisions utiles sur le régime de la domanialité publique.

Néanmoins :

  • elles ne règlent pas le problème de l’hypothèque légale car même les biens dépendant du domaine privé d’une personne publique sont insaisissables,
  • elles créent des interrogations sur le montage des nouveaux ensembles immobiliers dans lesquels une personne publique sera propriétaire.

Une intervention du législateur serait donc la bienvenue…